Tandis qu’août tire lentement sa révérence, le ciel de septembre est déjà installé…

De toute façon, c’est déjà l’hiver dans ma tête. Je sens le givre sur les vitres de mon âme, et le vent froid qui souffle dans mon cœur.

 

Assise sous le porche, mon café chaud à la main, je me sens glisser du fauteuil comme si mes jambes ne me soutenaient plus.

Ce soleil si chaud autrefois ne me réchauffe plus.

 

Je me sens divaguer, partir, loin dans mes souvenirs… Et il gèle, là-bas.

D’un hiver infernal et éternel.

Qu’ai-je à trouver que je ne chercherai pas ?

Il n’y a rien là en bas, je le sais. Pourtant mon âme sans cesse y revient, et mon cœur semble parfois y être resté pour de bon.

 

J’ai les yeux ouverts, mais à la place de l’herbe jaunie par la chaleur, c’est de la neige que je vois.

De la neige souillée de sang.

 

Goutte après goutte, là où mon âme s’est brisée, ce rouge coule et ne cessera jamais de couler.

 

Dans ma mémoire brisée en mille morceaux de glace, j’essaie de réparer, retrouver ma trace.

 

Mes pas dans la neige, et puis les siens…

Celui qui me suivait, couteau à la main.

Il me suivait et je l’aimais pourtant. Mais pas ce jour-là, et plus jamais ensuite.

Je revois son visage écrasant le mien. Me disant qu’il me tuerait s’il n’obtenait pas de moi ce qu’il souhaitait.

Je l’ai laissé faire. Et puis le sang a coulé.

Je l’ai laissé faire, et je me suis perdue.

 

Neuf mois plus tard, j’accouchais dans les larmes. D’un bébé mort-né dont je n’ai  de toute façon jamais voulu.

Paix à ton âme, petit enfant. Ta vie n’aurait pas été belle, de toute façon.

Quelle vie aurais-je offert à ce petit être détesté d’office ?

Moi qui étais morte aussi…. Et qui vivais pourtant.

 

Les restes de ma vie s’étalent devant moi. Et « restes » est bien le mot, car on parle de lambeaux.

Ma chair s’est éteinte un jour de neige.

Et s’il arrive que le soleil réchauffe ma peau, jamais il ne touche mon âme, congelée depuis toujours.

 

Les derniers rayons du jour m’ont ramenée trop loin dans le passé. Le café a refroidi et le vent s’est levé.

Le ciel s’est assombri, les nuages se sont amassés… Il y aura peut-être un orage ce soir.

Et qu’est-ce que ça peut me faire, dis-moi ? Pour moi l’orage c’est tous les jours.

 

Ma vie n’est que poussière. J’attends la mort.

Ou alors j’attends… quoi ? Que la neige fonde enfin, que l’hiver se termine, que le sang s’évapore et que mes larmes se tarissent.

Mais c’est trop demander, trop demander…

 

Je devrais peut-être mettre un peu de whisky dans mon café, cela égaierait mes soirées.

La neige se noierait dans l’alcool et je ne verrais plus le sang.

Le soleil étire ses derniers rayons, il est temps d’aller se coucher et d’oublier un peu.

 

Demain sera un autre jour. Ou bien le même… J’espère toujours que les choses changent.

J’espère me réveiller à nouveau vingt ans plus tôt, sans neige dans la bouche, sans glace dans le cœur, et l’âme entière plutôt que déchirée.

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