Elle a trié ses vieilles photos, un soir d’été dans son grenier poussiéreux.
C’était une soirée mélancolique au cours de laquelle il n’y avait rien d’autre à faire…
Assise là, ne faisant même plus attention à sa robe neuve qui prenait la poussière, elle regardait les souvenirs étalés de sa vie, effleurant de sa main le doux visage d’ange qu’elle avait été et qu’elle ne reconnaissait pourtant plus.
« Ce bébé, tout juste naissant, dans son petit berceau, c’est moi. »
Quelle bizarrerie de se dire, « voilà ce que ce petit être est devenu : moi aujourd’hui, assise au fond de mon grenier, au milieu des poussières »…
Elle a trié ses photos ce soir-là, et est redescendue avec un petit paquet de jolis souvenirs choisis parmi tous les autres.
Elle a posé le tout sur la petite table, dans l’entrée, et ne s’en est plus occupée ensuite.
Jusqu’à ce que, un soir d’automne pluvieux, elle le remarque et s’en souvienne… Elle prit le petit tas, alors, et n’ayant rien d’autre à faire, regarda à nouveau les photos.
En les regardant de plus près, elle prit conscience du fait qu’elle avait choisi les photos où elle était le plus joyeuse.
La joie, ou bien la douceur de l’amour.
Et alors elle tomba amoureuse de son propre regard.
Elle qui, jusqu’à présent, ne ressentait que le vide de ne pas exister… elle prit conscience, brusquement, qu’elle avait existé, vécu des aventures, ressenti des choses...
Et que ce regard profond, qu’elle avait pu parfois envier à d’autres, lui appartenait également.
Elle, qui s’était toujours crue vide et sans saveur…
Le regard plongé sur les photos, dans les yeux de la petite fille, puis dans ceux de la jeune fille, elle retrouvait tout à coup beaucoup de ce dont elle avait cru avoir manqué…
L’amour de la vie, l’amour de l’espoir, l’amour de l’inconnu et de la vérité, tout était écrit là, dans ce petit visage, dans ce grand regard.
Elle avait aimé dans la haine, elle avait aimé dans la colère, elle avait aimé de toutes les façons possibles.
Et ce, bien que la vie l’aie malmenée…
Elle avait voulu lui donner toutes ses chances, comme être tendre avec la vie, même si elle n’était pas tendre avec elle.
Assise à la table du salon, les photographies éparpillées autour d’elle, elle se demandait si le destin lui accorderait enfin la paix qu’elle avait tant cherchée.
« J’y ai droit, maintenant », pensa-t-elle.
Elle observa le salon, regarda encore les photos, et soupira.
Le long soupir d’une vie qui a été bien vécue, et qui continuera de l’être.
« Je te dois bien ça », dit-elle à la petite fille qui lui souriait sur la photo.
Et elle sourit en retour, de ce même sourire innocent et naïf qui ne l’avait, en fin de compte, jamais quittée.
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