Clara, accoudée à la fenêtre, regardait dehors.
L’appartement donnait sur un parc, et en face les autres HLM.
C’était peu de choses, pas la meilleure vue du monde, mais c’était déjà ça.
La fenêtre, c’est l’endroit préféré de Clara.
Regarder ce qui se passe en bas, les enfants qui jouent. Regarder les autres balcons et la vie qui s’anime.
Ou, simplement, observer le ciel et les nuages.
J’avais souvent envie de dire « A quoi penses-tu Clara, quand tu regardes en bas ? »
Et aujourd’hui, sans le savoir, sans le faire exprès, elle a répondu à la question.
« Partons d’ici. »
J’étais sur le canapé -un vieux truc déchiré de partout, récupéré aux puces- perdu dans le néant, à regarder Clara qui regardait ailleurs.
« On s’en va. J’en ai marre. »
Elle s’est tournée vers moi, ses yeux étaient perçants et décidés.
« T’es sérieuse ? » J’ai dit.
- Bah oui. Qu’est-ce qui nous empêche de partir ?
- L’argent, peut-être, j’ai répondu.
Clara a soupiré, les yeux en l’air.
Elle a pris une clope dans le paquet posé sur la petite table, et le briquet posé à côté.
Elle a allumé la clope, aspiré la fumée, et toussé.
« Tu fumes, maintenant ? »
Clara qui, subitement, alors qu’elle détestait l’odeur de la clope froide dans l’appartement, s’en était allumé une… Il fallait le voir pour le croire.
Elle m’obligeait toujours à aller sur le balcon, même en hiver. Mais là, elle fumait, librement, et à l’intérieur en plus.
« J’ai pas à me justifier, je te dois rien. »
Elle lève les yeux au ciel, encore :
« Bon. On se casse, c’est tout. »
Elle était sérieuse.
Un truc que j’ai appris, avec elle, c’est de rien discuter. Si elle veut quelque chose, elle l’aura de toute façon.
Argent ou pas argent, elle s’en fout : si elle veut partir, on partira.
« Lève ton cul du canap’, prépare des affaires, et on y va. C’est comme ça que ça se passe. Ou alors je pars, et tu restes là. On va pas en parler pendant cent sept ans.
- J’ai compris, ça va, je lui ai dit. Tu sais au moins où on va ?
- Non. On se barre, déjà, et après on saura. C’est ok pour toi ?
- Est-ce que j’ai le choix ?
- Non…
Sourire au coin des lèvres.
Alors je fais ce qu’elle me dit, je lève mon cul du canap’, et je prépare des affaires.
Elle me regarde, amusée, excitée. Elle écrase la clope et commence à remplir son sac à dos, avec toutes les affaires qu’elle peut, tout ce qui lui paraît important.
Et c’est comme ça qu’on est parti. Chacun un sac à dos, et tout laissé en plan.
On ne discute pas les idées de Clara. Mais là, j’avoue, c’était une putain de bonne idée.
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